État des lieux de la consommation d'écrans par les enfants et les jeunes

(voir études MIKE et JAMES)


Pourquoi sensibiliser les enfants et les jeunes à un usage raisonné des écrans ?

Les écrans apportent une quantité d'avantages mais également d'inconvénients. Parmi ceux-ci, l'Association américaine de pédiatrie (AAP) relève :

  • Obésité : sédentarité et "snacking" devant l'écran
  • Dépression : avec l'utilisation des réseaux sociaux, surtout chez les jeunes qui les utilisent de manière passive (sans interagir, ni publier)
  • Troubles du sommeil : exposition à la lumière bleue qui retarde l'horloge interne et utilisation nocturne du smartphone
  • Échec scolaire : effets négatifs sur l'attention, la concentration, utilisation de médias de divertissement en même temps qu'ils réalisent d'autres activités comme les devoirs
  • Exposition précoce à l'alcool, au tabac et au sexe : notamment au travers de la publicité sur les réseaux sociaux
  • Problèmes relationnels : l'usage du portable par les parents engendre des conséquentes négatives sur le développement émotionnel et social.

Les problèmes posés par une trop importante utilisation des écrans sont variés et sont fonction de l'âge des enfants :

Chez les tout-petits (jusqu'à 3-4 ans), Marcelli (2019) évoque un trouble développemental nouveau, l'Exposition Précoce et Excessive aux Écrans (EPEE). L'écran est considéré comme un perturbateur environnemental nouveau qui interfère dans les besoin développementaux des tout-petits. L'Académie des Pédiatres Américains a assoupli ses recommandations pour cette tranche d'âge en conseillant : de commencer par décider du temps consacré à d'autres activités (dormir, jouer avec d'autres personnes, etc) puis accorder 10 minutes par session en privilégiant les écrans interactifs (tablette) destinées à des activités interactives accompagnées par les parents, dans le but de développer les sens de l'enfant. La télévision est totalement proscrite. Caron (2014) explique que différents repères (spatiaux, temporels) sont construits par le tout-petit en interaction avec son environnement et qu'il s'agit de proscrire les écrans passifs dont les effets négatifs sont démontrés. Les tablettes peuvent être utilisées en complément aux jouets traditionnels mais toujours accompagnées. Il s'agit que l'écran ne fasse pas écran à la relation.

Entre 3 et 6 ans, avec l'accession à la pensée symbolique, quand l'enfant comprend qu'il peut passer du réel au virtuel, l'accompagnement des adultes est essentiel pour lui apprendre que ce qu'il voit sur un écran n'est qu'une simulation de la réalité (Desvignes & Martin-Lebrun, 2014). Des sessions accompagnées d'une durée maximum de 20 minutes sont conseillées. Le risque existe de s'enfermer dans le monde des écrans au dépends des activités d'apprentissage et des relations interhumaines. Il s'agit donc d'encourager les enfants à consommer moins d'écrans mais mieux, l'apprendre à choisir ses programmes. Desvignes & Martin-Lebrun (2014) identifient 3 situations à risques qui nécessitent une vigilance particulière : l'exposition à la publicité qui contribue au développement de l'obésité infantile ; la "télé-nounou", constamment allumée à la maison, qui rassure les parents mais qui empêche l'enfant de réaliser une quantité d'activités et d'apprentissages ; l'exposition aux images violentes, qui peut conduire l'enfant à s'identifier aux agresseurs ou aux victimes et développer des fonctions réparatrices. Tisseron (2014, 2018) recommande le jeu des trois figures, dans lequel l'enfant doit s'imaginer, dans le cadre d'une situation agressive, tour à tour dans les postures de victime, agresseur et redresseur de tort afin de développer sa capacité d'empathie.

De 6 à 9 ans, pour Tisseron (2018), c'est une période où l'enfant a besoin de découvrir les règles du jeu social. Il conseille de respecter les âges indiqués pour les programmes et les jeux vidéo ; c'est le dialogue en famille qui permet à l'enfant de donner du sens à ce qu'il peut voir et ressentir. L'usage d'internet présente un risque de confusion entre les espaces intime et public, cette notion n'étant acquise que vers les 7-8 ans. De même, avant de pouvoir utiliser internet sans danger, l'enfant doit assimiler la notion de point vue permettant de comprendre que plusieurs personnes peuvent avoir des points de vue différents sur un même sujet.

Entre 9 et 12 ans, le principal risque est de consacrer trop de temps aux écrans (Tisseron 2018) ; la violence est également problématique, mais ce facteur n'en est qu'un parmi d'autres qui déclenchent ou inhibent des conduites agressives.

Dès 12 ans, les enfants se familiarisent avec les réseaux sociaux qui deviennent un nouvel espace d'expérimentation sociale qui permet aux jeunes de se définir et de définir le monde qui les entoure (Tisseron, 2018). La combinaison de la fréquentation de relations réelles quotidiennes et en ligne leur permet de renforcer leurs compétences sociales. La violence reste le premier problème mis en avant à cet âge. Le second étant l'utilisation excessive. Les usages problématiques des jeux vidéo constituent un révélateur de problèmes sous-jacents. TIsseron conseille de faire la différence entre "des usages passionnels qui enrichissent la vie et des usages pathologiques qui l'appauvrissent".

Ces différents conseils sont à envisager dans une évolution familiale, un changement collectif. Il sera difficile pour les parents de demander à un enfant de ne pas tout laisser pour lire un message sur son téléphone s'il a toujours vu ses parents le faire… Pour TIsseron (2018) Fixer des règles collectives est la meilleure façon de nous encourager mutuellement à les respecter : ne pas décrocher son smartphone pendant le repas, déposer ses outils numériques dans un endroit jusqu'au lendemain, etc. Le moment de la rentrée scolaire qui bouleverse les emplois du temps et les habitudes s'avère une bonne opportunité de proposer des changements.


Comment sensibiliser les enfants et les jeunes à un usage raisonné des écrans ?


Des objectifs de sensibilisation :

Voici quelques objectifs qu'il est possible de travailler avec les élèves :

  • La perception du temps :
    • Savoir quand et pourquoi prendre une pause des écrans
    • Faire prendre conscience aux élèves de la notion du temps qui passe, de la différence entre estimer et mesurer une durée

  • Gérer les activités branchées et débranchées : Je ne passe pas tout mon temps devant les écrans
      • Fais un dessin des différentes activités que tu réalises : entre branché et débranché
      • Écris à propos d’un moment où tu aimes mettre à l’écart les technologies

  • Connaître les différents écrans et les différents types d'activités qui leur sont liés : Je sais ce que je peux faire avec les différents écrans
    • Inventaire des écrans et de leurs caractéristiques (not. passif vs actif)

  • Vivre ensemble :
    • Gérer les relations sociales et les écrans :
      • Pourquoi prendre une pause de son écran quand un ami vous dit bonjour ?
      • Pourquoi inviter un ami à jouer quand il est seul ?
      • Prendre en compte les sentiments des gens autour de soi, même quand on est dans une activité sympa en ligne

  • Réaliser que le sommeil est un besoin
    • Réfléchir au rôle du sommeil, à ce qui peut le troubler,
    • Réaliser quels sont les signes et les effets du manque de sommeil
    • Pourquoi est-ce une bonne idée d’éteindre son téléphone avant d’aller au lit ?

  • Distinguer le public du privé :
    • Pourquoi on doit demander l’autorisation avant de prendre le téléphone de quelqu’un ?

  • Réfléchir aux notions de concentration et d'attention

  • Réaliser que les écrans donnent à voir des émotions et en déclenchent en nous

  • Consommer des programmes et contenus adaptés : les programmes télévisés, la signalétique jeunesse
    • Je sais reconnaître des programmes télévisés adaptés à mon âge
    • Je sais parler avec un adulte de ce que j’ai vu à la télévision

Des ressources à explorer et utiliser selon vos besoins

Des recommandations en affiches

(Cliquer sur l'affiche pour accéder à sa source, la télécharger ou l'imprimer)

https://app-enfant.fr/wp-content/uploads/infographie.jpg





Références :

Le Pommier, (2013). L'enfant et les écrans : Avis de l'Académie des Sciences française. Editions Le Pommier. Disponible en ligne https://www.academie-sciences.fr/pdf/rapport/avis0113.pdf

Caron, F.-M. (2014). Clics et… claques ? Écrans et enfants, la règle 3-6-9-12. DIsponible en ligne

Desvignes, V., & Martin-Lebrun, E. (2014). Pédiatrie ambulatoire: Doin.

Marcelli, D. (2019). Exposition précoce et excessive aux écrans. Comment repérer et prévenir les troubles associés. [Excessive early exposure to screens: How to detect and prevent the associated disorders]. Futuribles, 433(6), 27-40. doi:10.3917/futur.433.0027

Tisseron, S. (2018). 3-6-9-12. Apprivoiser les écrans et grandir. Toulouse, France: ERES. doi:10.3917/eres.tisse.2018.03.

Tisserons, S. (2013). Grandir avec les écrans, la règle du 3-6-9-12. Fédération Wallonie-Bruxelles. Disponible intégralement en ligne : https://www.yapaka.be/sites/yapaka.be/files/publication/ta-64-ecrans-tisseron-web.pdf

Tisseron S., « Chapitre 26. Développer l’empathie dès la maternelle pour s’opposer à la violence : le jeu des trois figures », dans : Roland Coutanceau éd., Violences psychologiques. Comprendre pour agir. Paris, Dunod, « Psychothérapies », 2014, p. 292-301. URL : https://www.cairn.info/violences-psychologiques--9782100712380-page-292.htm

Recommandations de l'American Academy of Pediatrics :
https://www.aap.org/en-us/about-the-aap/aap-press-room/Pages/American-Academy-of-Pediatrics-Announces-New-Recommendations-for-Childrens-Media-Use.aspx